Les jours passent et les années trépassent, mais le
pouvoir togolais n’a cure de changer ses attitudes de prédations des libertés
individuelles. Étiqueté presque comme un État voyou qui ne respecte
pas les droits les plus élémentaires des citoyens, le Togo se fait épinglé lors
de la 67ème session ordinaire du Comité des Nations Unies contre la torture. Et
pour cause !
La
situation des Droits de l’Homme dans le monde est régulièrement passée à la
loupe par le Haut-commissariat des Nations Unies pour les Droits de l’Homme qui
y consacre des sessions au cours desquelles les États parties présentent leur
situation intérieure des Droits humains sous forme d’une évaluation par les
pairs.
Ainsi,
le 26 juillet dernier, une délégation du gouvernement togolais conduite par le
ministre des Droits de l’Homme et des Relations avec les Institutions de la
République, Christian Trimua a présenté à Genève, le 3è rapport périodique du
Togo sur la mise en œuvre de la convention contre la torture et autres
traitements cruels, inhumains ou dégradants. C’était à la faveur de la 67ème
session ordinaire du Comité des Nations Unies contre la torture. Mais comme à
l’accoutumée, le Togo est épinglé dans sa passivité contre les actes de
torture.
En
prenant à contrepied le Ministre togolais des Droits de l’Homme qui tentait de
faire croire que « depuis 2015, il n’y a pas eu de plaintes pour torture au
Togo », M. Sébastien Touzé, Expert au Comité des Nations Unies
contre la torture déclare : « Il y a eu 16 plaintes en 2018 pour
torture devant la justice. Quel traitement ont été fait de ces plaintes
? ». La réplique de M. Touzé rétablit la vérité sur les actes de
torture au Togo et qui souvent, portent les griffes des forces de sécurité et
de défense. L’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et ses partenaires
ont dénoncé l’usage délibéré de la torture par les agents de l’État dans un
rapport alternatif « Un pas en avant, deux pas en arrière ». Ils ont
aussi condamné « l’usage excessif de la force par les agents de l’État lors des
violentes répressions des manifestations au Togo, en utilisant parfois des
balles réelles. Ce fut le cas de Moufidou Idrissou, un enfant de 11 ans, tué
par balle en 2018 alors même qu’il ne participait pas à la manifestation ».
Aussi
l’OMCT est-elle préoccupée par certains interrogatoires, détentions et
jugements qui se déroulent sans la présence d’avocats, par exemple lors de
gardes à vue de 26 jours ou encore lors du prononcement de condamnations à la
prison ferme de 2 à 5 ans. « Les conditions dans la plupart des
prisons togolaises peuvent être assimilées à des mauvais traitements ou à de la
torture: surpopulation carcérale de 164% en 2016, locaux vétustes, voire
nombreux décès liés au manque d’accès aux soins de santé et carences
alimentaires, » souligne ce réseau mondial de lutte contre la
torture et autres violations des Droits de l’Homme.
Cas de torture…
Le
Togo est souvent identifié comme un pays qui ne respecte pas les lois
internationales les plus essentielles, et viole systématiquement les droits les
plus élémentaires de l'être humain.
Il
y a quelques semaines, M. Abdou-Aziz Goma, 49 ans, Irlando-togolais, commerçant
de son état, lançait, depuis la prison civile de Lomé, un cri de détresse aux
autorités irlandaises pour le sortir du désarroi. « Je ne sais combien de
temps cela va encore durer, mais je ne pense plus pouvoir tenir pendant
longtemps. J’ai besoin de mon pays. SAUVEZ-MOI ! S’il vous plaît, sortez-moi de
là, je vous en supplie ».
Ce
sont-là les cris de détresse de cet Irlandais qui, de passage à Lomé pour la réception
d’une cargaison de marchandises acheminées par bateau depuis Manchester (Nord
de l’Angleterre), a été arrêté le 21 décembre 2018 et jeté en prison, accusé,
selon ses déclarations, de financer le PNP (Parti National Panafricain), un
parti politique au Togo. Une accusation que rejette catégoriquement M. Goma détenu
depuis 08 mois à la prison de Lomé sans procès. « Ce jour (de notre
arrestation, ndlr), nous avions vécu l’enfer. On nous a menotté par derrière
bien serré jusqu’à l’os contre des arbres, d’autre contre des voitures, on nous
avait bien tabassé, torturé jusqu’au Sang. Je vomissais que du sang sous ce
traitement. Cette torture a duré jusqu’à 03H du matin, c’était vraiment de
l’enfer ; j’ai même prié Dieu de m’ôter la vie plutôt que de subir tous ces
tortures ; nos bourreaux étaient d’une unité dont j’ignore le corps. Ils
seraient de l’U.S.I.G, et seraient le groupe des tortionnaires selon ce que
j’avais pu entendre. Jusqu’au petit matin, ils ne nous ont posé aucune
question. Vers 07H du matin, ils sont venus nous démenotter autour des arbres
et des voitures, et nous ont jeté dans la poussière, menotté on est resté là,
par terre, jusqu’à midi sous un soleil ardant avant de nous ramener sous les
arbres, » a relaté M. Goma avant de raconter une simulation d’exécution :
« cette
nuit-là, ils nous ont fait assoir l’un à côté de l’autre dos au mur, toujours
menottés, 03 agents au total dont 03 de (U.S.I.G) Unité Spéciale d’Intervention
de la Gendarmerie, 04 de la Gendarmerie et leur Commandant au nom de Kabia,
chacun d’eux avait son arme bien pointée sur tout un chacun de nous. Là, nous
avions tous prié le Bon Dieu puisque nous avions cru que c’était la fin de nos
Vies. Le commandant lors du chargement de son pistolet automatique, a fait
tomber la balle de son arme... ». Il dit aussi qu’il est accusé
d’être un émissaire de la Diaspora Togolaise en Europe. Aussi un
Américano-togolais de passage à Lomé, a été arrêté et jeté en prison
contraignant les proches de celui-ci, des militants du PNP, Vodzogbé Kossi,
Tante Ouano, Tchacorom Rachaad pour ne citer que ceux-ci à prendre le maquis.
Dans
ses habitudes, le pouvoir togolais se fonde sur ce prétexte de personnes qui financent
les partis d’opposition pour les écrouer. Il y a quelques années, le jeune Gbaffa
Kokou Mensan a vécu une situation pareille à celle d’Abdou-Aziz Goma. Aussi arrêté
dans des conditions rocambolesques, selon son entourage, sous prétexte de
financer dans sa localité l’ANC, Alliance Nationale pour le Changement, un
parti de l’opposition au Togo, Kokou Mensan a passé de pires moments dans les
mains des forces de sécurité. Son tort, selon son entourage, est d’avoir loué
son véhicule pour la campagne présidentielle de l’opposition et de s’être
remonté contre une locataire, militante du parti au pouvoir qui a transformé
une maison de location (de M. Mensan) en un QG de campagne où elle y distribuait
des tricots à l’effigie du président. Le rappel à l’ordre de cette dame a créé
de gros ennuis au sieur Mensan.
L’année
dernière, dans son rapport couvrant la période du 19 août 2017 au 20 juillet
2018, la Ligue Togolaise des Droits de l’Homme (LTDH) à la suite d’autres
organisations de la société civile togolaise, a dressé le bilan des répressions
au Togo qui sont, non seulement l’œuvre des forces de sécurité et de défense,
mais aussi de la milice du régime. Intitulé : « la répression et la
torture contre le changement démocratique », ce rapport a révélé des
cas d’assassinats et tentatives d’assassinat, des atteintes à l’intégrité physique
et des destructions, extorsions de biens, pillages et vols, des disparitions
forcées, des tentatives d’enlèvement et menaces et, des exactions commises sur
les mineurs. Extrait de ce rapport, Page 14 : « Le 18 octobre 2017, jour
de l’assassinat de l’élève de 10 ans en classe de sixième, Kokou Joseph
Zoumekey, un groupe de gendarmes appuyé par des militaires ont lancé des gaz
lacrymogènes sur un groupe de journalistes et de défenseurs des droits de
l’Homme présents sur le terrain. On pouvait entendre les gendarmes sur des tons
menaçants déclarer « C’est les droits des animaux que vous allez défendre… » ;
« Laissez-nous faire notre travail… » ; « Vous n’avez encore rien vu… » ; « Ne nous
filmez pas… » ; « Si quelqu’un tourne sa caméra vers moi je tire sur lui… ».
C’est
croire que le Togo a encore d’énormes efforts à faire pour sortir des esprits,
cette image non reluisante d’État voyou qui ne respecte pas les droits les plus
élémentaires des citoyens. Car, pour l’heure, la fréquence des méthodes de
répression et de torture, contraint plusieurs Togolais, notamment ceux qui sont
identifiés à tort ou à raison, comme membre ou soutien quelconque de l’opposition,
à fuir le pays.
Cas de Torture : Le Togo encore épinglé par les Nations Unies
